Très connu dans le monde du cinéma (il a collaboré avec les plus grands réalisateurs italiens ou étrangers, de Nanni Moretti à Ridley Scott), Sandro Bettin a développé une oeuvre plas- tique dont le cœur est le seul et unique protagoniste. Organe central de notre corps, siège supposé de toutes nos émotions et objet porteur d’une symbolique forte, il est également au centre de toutes les représentations religieuses de l’art classique occidental et le sujet par excellence des ex-voto, objets aux pouvoirs magiques et mystérieux qui rappellent l’étroitesse du lien entre la vie et la mort,... Si les cœurs de Sandro Bettin font immanquablement penser aux cœurs du baroque flamboyant, ils sont dépouillés de toute implication religieuse, pour devenir l’incarnation d’une réflexion douloureuse sur le temps qui passe, sur la difficulté d’appréhender son infinité. Ils semblent mettre en garde le spectateur sur le risque de vivre une existence vide de sens à force d’attendre passivement la vie promise dans l’au-delà. Le cœur qui occupait un petit bout de la toile des grands maîtres classiques a envahi tout l’espace et l’on en vient à dresser l’oreille pour écouter ses battements, ce bruit qui lorsqu’il s’arrête nous avertit que tout est fini.